Forestier R., Françon A. et Graber-Duvernay
B.[1] ont publié une analyse de la littérature au sujet des critères de
validité d’un essai thérapeutique et l’impact en Evidence Based of Medecine. Ces auteurs centrent leur analyse sur l’utilisation des grilles de lectures
quantitatives (GLQ). Si elles restent encore incontestables, leurs démarches
scientifiques reste encore à démontrer quant à leur rigueur. De plus, il serait
tentant de faire l’amalgame entre la valeur des essais thérapeutiques et la
valeur de la thérapeutique elle-même. Le but de cet article est donc de
déterminer les domaines de la validité d’un essai thérapeutique faisant l’objet
d’évaluations possibles. Les auteurs ont l’ambition également de créer une aide
pour élaborer des grilles de lecture prenant en compte les contraintes
spécifiques aux essais cliniques non-médicamenteux.
La revue de littérature débute par la
sélection d’articles à partir de Medline avec une liste de mots clés définie au
préalable. Les auteurs ont alors retenu les articles dans deux cas : quand
le test statistique était rapporté pour mesurer l’influence du biais et quand
l’influence du biais lui-même sur le résultat était calculée. Ensuite leur
recherche se poursuivait par la fonction « related articles » pour
s’achever après un certain nombre d’itérations. Les résultats de cette revue sont alors
très instructifs sur l’évaluation d’un traitement. La qualité globale des
essais selon cinq méta-analyses serait surestimé pour 1/5ème des effet des traitement et
sous-estimé pour 2/5ème.
Au sujet du consentement éclairé, il a été
observé que le recueil, avant un essai randomisé, diminuait la différence entre
le placebo et le produit actif [2]. Le non-consentement représente un biais de
validité externe (voulant dire au delà du champ d’experimentation) de l’étude
mais reste encore à mesurer.
Concernant les populations étudiées,
l’exclusion d’une part importante des patients dans une étude conduit à des
populations non-représentatives, d’autant plus que cette représentativité est
rapportée de façon trop inconstante [3]. D’autre part, il n’est écrit que très
rarement le nombre de patient enrôlés sur la totalité éligible. Une
méta-analyse sur 172 essais cliniques fait état d’un ratio nombre de patients
examinés sur nombre enrôlés de 1,8 à 68[4]. Il semblerait également que
certains critères d’inclusion et d’exclusion conduisent à sélectionner une
population de « répondeurs » : autrement dit ces derniers
auraient une réponse supérieure au reste de la population. D’un point de vue
statistique, les multiplications des analyses en sous-groupes augmentent la
probabilité de trouver un résultat statistiquement significatif. Si vous voulez simplifier votre apprentissage en biostatistique, le GERAR vous propose de cliquer ici.
Un autre paramètre étudié dans la validité
concerne le type de comparaison mis en place dans les essais. Comparé à un
placebo, il a été mis en évidence que dans les études double insu, le
consentement éclairé diminuait la validité externe de l’étude [5]. Ensuite, beaucoup
d’essais avantageraient les traitements les plus récents par rapport aux plus
anciens.
A noter que l’insu du thérapeute et son
influence n’a jamais était étudié ou tout du moins aucune étude ne fait état de
ce paramètre. Dans le même registre, aucun travail n’a été retrouvé sur
l’influence des évaluateurs sur le résultat de l’étude.
Une autre donnée indispensable : le conflit d’intérêt. Dans une enquête américaine auprès des auteurs, 87 % des chercheurs avaient une interaction avec l’industrie pharmaceutique et 100 % pour les seuls auteurs de recommandations pour la pratique clinique [7]. A noter également le faible taux de réponse de ces auteurs : 37% qui laisse sous-entendre une éthique professionnelle vacillante… A la lecture de la partie discussion, les auteurs rapportent les travaux de comparaison de différentes grilles quantitatives sur différentes thématiques comme la validité de l’exercice physique dans la lombalgie chronique. La conclusion des revues systématiques varie suivant qu’on utilise un score de qualité ou un autre pour leur reproductibilité et la supériorité de l’exercice physique par rapport aux traitements habituels [8]
Enfin pour l’évaluation pharmacologique versus
l’évaluation non-pharmacologique, si la différence était en faveur des essais
médicamenteux, elle résulte de l’absence dutilisation de comparaison à un
placebo ou d’autres patients [9]. En termes de sensibilité et de spécificité,
rien n’a été encore développé avec précision laissant à penser que ces GLQ ne
prennent pas en compte le type de traitement évalué et la variabilité que cela
sous-entend.
Avis du GERAR:
Pour tous les soignants désireux de se
lancer dans la recherche clinique, cet article présente bien les pièges et les
biais à éviter concernant la rédaction d’une étude et en amont l’élaboration du
protocole.
La méthodologie d’analyse des articles est
succincte mais reste explicite avec effort de transparence de par la chronicité
relatée. Sur leur propre article, les auteurs discutent leur méthode qui, comme
l’image du serpent qui se mord la queue, est entachée de subjectivité du fait
de la non utilisation de grille de lecture afin de pouvoir les critiquer.
Il ressort des résultats 3-4 champs d’analyse
de validité des articles mais parfois cela manque lisibilité. Ces données font penser à un
amoncellement de données d’articles comme par exemple le paragraphe sur la
randomisation qui est peu clair mais mérite un approfondissement.
L’effet placebo déjà étudié par le GERAR montre
encore l’étendue de ses capacités encore trop méconnues. Il prend comme exemple
en chirurgie : l’insu a permis de constater que l’arthoscopie versus une
pseudo-intervention n’était pas supérieure dans l’arthrose du genou !
La question de la validité scientifique par
le groupe contrôle placebo et par la pratique de l’insu représente encore un
gold-standard en médecine. Un autre champ d’investigation qui pourrait
compléter nos connaissances fondamentales serait l’évolution naturelle des
patients de certains mécanismes physiologiques. C’est-à-dire en d’autres termes
de considérer des groupes de population étudiés qui ne relèverai pas de la
prise en charge thérapeutique car non-recensé par le corps soignant mais qui
présenterait bien la pathologie étudiée. Par exemple combien d’entorses de
chevilles sont traitées médicalement parmi leur totalité existante ou bien
combien de personnes vont se faire soigner d’une angine chez leur médecin
traitant. Il y a là un manque de visibilité la « pathologie
naturelle » que la médecine n’arrive pas encore à apprécier. L’analyse sur
le recrutement des « répondeurs » abonde dans ce sens puisqu’il
parait évident que ces pratiques d’inclusion et d’exclusion peuvent favoriser
une confirmation de l’hypothèse de l’étude.
Et le thérapeute dans tout ça, trop peu
d’articles d’après les auteurs évaluent l’influence de ces acteurs. A croire
quelque part que l’intégrité de nos compétences fasse de nous des robots sans
sensibilité propre. Nous sommes fort heureusement des humains avec une
variabilité d’action qui influence par essence notre façon singulière de soigner Prenons par exemple, un
massage Quel chercheur peut trouver deux kinésithérapeutes qui produisent le
même effet thérapeutique alors qu’ils ont la même technologie de base. ?
Autre exemple, l’instruction de consignes d’exercices sous-entendant la
participation active du patient, évaluer l’intelligibilité des propos, la
compréhension du patient et l’application des consignes sont des paramètres
bien trop souvent occultés alors qu’ils paraissent essentiel dans la
réalisation du soin. A l’article de conclure que « nous sommes encore dans
la caverne de Platon » [1] et le GERAR ne peut que leur donner raison…
Alors comment conclure avec un message
d’espoir si ce n’est en rapportant que les conclusions des études scientifiques
publiées seraient pour 76% d’entre elles douteuses ou invalides selon Gotzche
[6, 1989]. Peut-être que la validité de nos travaux ne passe pas forcément par
l’absolution de nos pairs comme c’est très souvent le cas en rédaction
médicale ? Et si modeste GERAR que nous sommes pensons comme une évidence
que la pluridisciplinarité d’état (et non de principe) mise au service d’une
transparence objectiverait nos travaux scientifiques. Pour
que la validité ne soit pas la positivité des essais Trop peu d’études négatives publiéesdixit un expert comme
Maisonneuve H. et pour que l’hypothèse posée trouve systématiquement une
réponse, voilà le positionnement éthique d’une étude clinique pourrait avoir.
NS.
[1] Forestier R., Françon A.,
Graber-Duvernay B. Les paramètres de validité d’un essai thérapeutique et leur
influence sur l’élaboration d’une médecine fondée sur les preuves : revue
de littérature. Ann Réa Méd Phys. 2005. 48. 250-8
Les références suivantes sont tirées de la
lecture de l’article de Forestier et vous incite à approfondir votre critique
en accédant à leur lecture.
[2] Klejinen J., de Craen AJM., Van
Everdingen J.,Krol L. Placebo effects in double blind clinical trial : a review
of interaction with medications. Lancet 1994:344;1347-9
[3] Glasgow RE., Bull SS., Gillette C.,
Klesges LM.,Dzewatowski DA. Behaviour change intervention research in healthcare
settings. A review of recent report with emphasis on external validity. Am J
Prev Med 2002:23;(1):62-9
[4] Gross CP., MMallory R., Heiat A.,
Krumholtz HM. Reporting the recruitment process in clinical trial : who are
this patient and how did they get there ? Ann Inten Med. 2002;137:10-6
[5] Kirsch I., Rosadino MJ. Do double blind
studies with informed consent yiel externaly validity result ? An empirical
test. Psychopharmacology(Berl) 1993;110(4):437-42
[6] Gotzche P. Methodology and overt and
hidden bias in report of 196 double blind trial of non-streroidal and anti-inflamatory
durgs in rheumatoid arthritis. Control Clin Trial 1989;10:31-56
[7] Choudhry NK., Stelfox HT., Detsky AS.
Relationship between author of clinical practice guidelines and the
pharmaceutical industry. JAMA 2002;287(5):612-7
[8] Hill CL., La Valley MP., Felsoa DT.
Secular changes in the quality of published randomized clinical trial in
rheumatology. Arthrisis Rheum 2002;46(3):779-84
[9] Boutroa I., Tubach F., Giraudeau B.,
Ravand P. Methodology difference in clinical trial evaluating
nonpharmacological and pharmacological treatment of hip and knee
osteoarthrisis. JAMA 2003;290(8):1062-70
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