La qualité de nos prises en charge en
tant que professionnels de terrain repose sur des concepts théoriques.
Cependant cette théorie ne doit pas être prise comme vérité absolue, elle doit être
sans cesse remise en question. Ce qui est vrai en sciences l’est parce que rien
d’autre ne prouve encore le contraire. Un œil critique est essentiel pour faire
le lien entre la théorie et la pratique. C’est de ce regard critique dont il
est question dans les articles écrit par Salmi LR [1,2]
Salmi LR écrit en 1999 [1] « une lecture critique
alliant bon sens et rigueur méthodologique peut être le fondement d’un
raisonnement clinique […] permettant d’assoir des décisions utiles et de
qualité ». Salmi LR met à jour et augmente ce premier article paru dans la
lettre de l’infectiologue dans l’EMC Médecine en 2004 [2]. Le GERAR analyse ces 2 articles pour mettre en lumière
l’importance de cet esprit critique.
Salmi LR divise son article [1] en 3 sous parties : sélection
des revues, qualité des méthodes et utilité de l’étude.
Une revue scientifique se doit de
garantir une qualité à ses lecteurs par la relecture des manuscrits proposés.
Cette relecture est réalisée par un comité de lecture, généralement 2 ou 3
personnes compétentes choisies par le rédacteur en chef, dans le domaine du
manuscrit envoyé par un ou plusieurs auteurs. Ce comité de lecture est décrit
en début de revue. Les dates de soumission et d’acceptation sont présentes au
début de l’article. Pour aider les revues dans leur présentation, des comités
de rédacteurs se sont réunis afin de produire des normes de présentations à suivre afin d’homogénéiser les
revues proposant des articles scientifiques. La convention de Vancouver fait
partie de ces normes qui rassemblent des règles techniques et déontologiques
que tentent de respecter des centaines de revues nationales et internationales.
Vous trouverez dans le document écrit par Peignier en 2004 toutes les normes Vancouver pour vos
références bibliographiques.
Salmi LR termine cette première partie
sur la sélection des revues par un point sur les conflits d’intérêts. Les
conflits d’intérêts entre l’industrie et les comités éditoriaux existent et se
doivent être explicités en début de revue. Tant que ceux-ci sont énoncés pour
un article, celui-ci ne doit pas tout le temps faire l’objet d’une réfutation
trop rapide, mais la méthodologie et les conclusions doivent bien être
analysées. Les membres du GERAR vous renvoient au blog bien fourni
d’un de ses collaborateurs, Hervé Maisonneuve.
La qualité des méthodes doit répondre
à la question posée par l’auteur. Le protocole, la sélection des sujets et le
traitement statistique doivent être décrits avec précision. Ainsi le schéma
d’une étude se doit de répondre à la question ou hyp énoncée en introduction.
Est-ce qu’une étude de cas renseigne réellement sur la relation de cause à
effet entre 2 méthodes de renforcement musculaire ? Il faut alors
positionner son raisonnement autour d’hypothèses et rester vigilant concernant
des affirmations trop rapides.
De plus, la description des méthodes
de sélection et de mesures statistiques doivent être correctement explicitées
afin d’éviter 3 grandes erreurs : les biais de sélection, les biais de
mesure et les biais de confusion. La méthodologie du protocole est alors
essentielle.
Est-ce que l’étude que vous avez sous
les yeux est utile dans votre pratique ? La pertinence de la question
posée par les auteurs joue un rôle important. Pour l’auteur [1], le domaine de l’article et le
manque d’originalité sont des raisons suffisantes pour ne pas lire l’article.
L’article peut aussi manquer de pertinence au regard de la représentativité de
la population testée. Exemple : Impact de la chaine cinétique ouverte chez
des patients traités orthopédiquement alors que vous vous occupez seulement de
patients opérés. La lecture critique continue et s’approfondie dans la partie
conclusion de l’article. Quelles sont les conclusions, et quel est l’effet qui
semble cliniquement significatif, et non seulement statistiquement
significatif. L’intérêt de cette logique est de reconnaître ce qui est
pertinent de retenir dans une pratique de terrain.
Salmi LR, conclut son article sur la
confiance donnée aux résultats, et si oui, sont-ils suffisants pour nous faire
changer de comportement. Il rajoute qu’il n’existe pas une seule façon de lire
un article, rapprochant la lecture critique à un mode de pensée et non à une
technique.
Dans son article datant de 2004, Salmi
reprend beaucoup de paragraphes paru dans son article précédent et rajoute
quelques illustrations intéressantes que vous retrouverez ci-dessous.
L’auteur approfondit les raisons
d’être de la lecture critique en posant 3 questions : Quelles questions se
pose-t-on en pratique médicale quotidienne ? Quelles sont les difficultés
rencontrées pour répondre à ces questions ? Quelles implications pour la
pratique quotidienne ?
Notre pratique quotidienne se voit
souvent remise en question par les patients que nous prenons en charge.
Qu’elles soient sur le versant thérapeutique, diagnostique, thérapeutique ou
encore pronostic, les patients veulent des réponses. Celles-ci se doivent
d’être guidées par ce qui est favorable pour le patient, par notre capacité à
nous tenir informé et notre aptitude à rendre la réponse compréhensible et
binaire : avantages et inconvénients pour le patient.
Les difficultés se rencontrent lorsque
trop de réponses sont possibles ou que le thérapeute ne possède pas la ou les
réponses. Ceci implique une perpétuelle recherche d’informations.
Avis
du GERAR
Les articles de Salmi, présentent
rapidement les principes de lecture critique, ils ont le mérite d’être
accessibles et résument bien les différentes étapes de sélection et les pièges
à éviter.
Depuis le début de l’aventure du
GERAR, les membres et collaborateurs analysent et critiquent la littérature
scientifique. Nous donnons notre avis et le diffusons au plus grand nombre afin
de débattre autour de la rééducation/réhabilitation. A la dernière JAPA de
Montpellier, où nous tenions un stand, plusieurs personnes nous ont posé cette
question intéressante : sur quels critères et stratégies vous appuyez vous
pour critiquer ces articles ou congrès ? La question sous-jacente à cette
interrogation était : qui êtes-vous ? La réponse fut simple :
Nous sommes des professionnels de terrains voulant prendre les décisions les
plus adaptées. Une pratique basée sur les preuves est alors de mise. Ces preuves se
retrouvent dans la littérature scientifique, il suffit d’ouvrir les revues qui
vous intéressent. Cependant, ces preuves ne sont pas si faciles d’accès. La HAS nous livre alors des
recommandations, mais
celle-ci est critiquée, et à juste titre.
La pertinence est un mot redondant
dans les articles de Salmi LR. Quelles sont nos prises en charge pertinentes
vis-à-vis des nouvelles recherches, publications, appareils utilisés, temps de
prise en charge, techniques de rééducation/réadaptation ? Posez-vous la
question, vous verrez qu’une remise en question est souvent nécessaire. Dans un
esprit de pluridisciplinarité, osez-vous ouvrir aux autres professionnels de santé
ou de la santé.
Quelle est la place de la pensée
critique dans nos formations respectives ? Est-ce que ce mode de pensée
est approfondi dans les maquettes d’enseignements de nos futurs
collègues ? Si oui, de quelle manière ? Si vous cherchez sur des
moteurs de recherches lecture critique d’articles (LCA) vous retrouverez
énormément de contenus de cours créés par des professeurs d’universités
médicales.
Plusieurs fois, et nous pensons ne pas
être les seuls, des étudiants nous expliquant que lire des articles n’apportait
rien de plus, et que c’était une perte de temps. Le message est surement mal
passé. Les sciences de l’éducation intègrent la pédagogie et la didactique,
pourquoi ne pas s’y mettre aussi ? Ce mode de pensée, pour reprendre les
mots de Salmi LR, est largement accessible et se doit d’être partagé.
Salmi LR évoque les comités de
rédactions. Rôle pas si facile à tenir et les membres du GERAR le savent car
nous réalisons plusieurs relectures attentives de nos manuscrits afin de vous
proposer des billets contenant des critiques et des ouvertures argumentées. Nos relectures sont parfois longues et renvoient
souvent à des discussions précieuses, malheureusement non visibles sur nos
articles. Sachez que chaque collaborateur du GERAR est passé par cette
relecture lorsqu’il a envoyé un manuscrit.
La critique s’aiguise avec le temps,
donnez-vous le temps de lire et de relire les articles que vous avez sous les
yeux afin d’en tirer le maximum et n’hésitez pas à partager vos analyses sur le
GERAR.
Pour conclure, Salmi LR nous offre
dans son article [1] un tableau sur
les 10 commandements de la lecture critique, le voici ci-dessous.
MV.
[1] Salmi LR. Principes de la lecture
critique d’un article scientifique. La lettre de l’infectiologue. 1999. Tome XIV
– N°9 :411-5 – Accès restreint.
[2] Salmi LR. Lecture critique d’un
article médical: à la recherche des innovations réellement utiles. EMC
Médecine. 2004 ;1 :178-86 – Accès restreint.
* Louis Pasteur. (1822-1895)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire