Les mauvaises pratiques en science, et notamment en sciences
de la vie existent. Ces mauvaises pratiques sont un continuum entre action
volontaire et action involontaire, souvent par ignorance méthodologie ou
ignorance des bonnes pratiques. Historiquement les mauvaises pratiques dans les
publications étaient appelées FFP pour ‘Fabrication, Falsification, Plagiat’.
Ce concept FFP est très utilisé en Amérique du Nord, car il correspond aux
définitions officielles des organisations fédérales, et de l’Office of Research Integrity.
La plupart des experts pensent que les mauvaises pratiques
ne se limitent pas à fabrication et falsification des données, ainsi qu’au
plagiat. Un groupe de rédacteurs et experts anglais [1] a proposé une
définition plus large en 2012 pour les mauvaises pratiques : « Il
s’agit du comportement, intentionnel ou non, d'un chercheur qui ne respecte pas
toutes les bonnes pratiques éthiques et scientifiques. Les mauvaises pratiques
scientifiques comprennent la fabrication, la falsification, la suppression, ou
la manipulation inappropriée de données ; la manipulation inappropriée d'images
; le plagiat ; les reportages trompeurs ; les publications redondantes ; les
mauvaises pratiques des auteurs comme les fantômes et les invités ; l'oubli de
citer les sources de financement ou les liens d'intérêts ; la mauvaise
présentation du rôle du financeur ; et la recherche non éthique (par exemple,
non obtention du consentement des patients) ».
Ce sont les articles, les revues qui sont en première ligne
pour suspecter, et parfois découvrir de mauvaises pratiques. Cette définition
est plus large et montre que beaucoup de comportements ne sont pas admissibles
en science. Ces pratiques gaspillent des ressources, mettent en péril la crédibilité
de la science, et peuvent engendrer des risques (par exemple pour les patients
et le public). Pourquoi The Lancet, dans un éditorial du 2 février 2013 [2],
suggère que 85 % des 160 milliards de dollars dépensés annuellement en
recherche seraient gaspillés ? Cette hypothèse a été émise par Iain Chalmers,
un des fondateurs de la collaboration
Cochrane. Ce ne sont pas que des mauvaises pratiques, mais ce chiffre est
effrayant.
Quant au contenu non éditorial des
revues (publicités, annonces diverses,..), il n’est en général pas ou peu
contrôlé par les comités de rédaction. La publicité a alors un contrôle externe
par des institutions dans certains pays. Rares sont les comités de rédaction
qui relisent les publicités, et donnent leur avis. La plupart des revues
refusent des publicités contraires à la santé publique (tabac par exemple, dans
les pays où ces publicités existent).
Lutter contre les mauvaises pratiques est difficile et deux
stratégies se complètent : les règles et codes d’éthique, la formation des
chercheurs (juniors et surtout séniors qui croient savoir sans avoir été
formés). La stratégie d’avoir des organismes publics chargés de détecter et
condamner les fraudes scientifiques est rare. Seuls les Etats-Unis, le
Danemark, et le Royaume-Uni ont des organismes spécifiques pour la fraude
scientifique. La France est en retard, comme la plupart des pays de culture
latine.. mais l’Asie ne semble pas concernée par ces débats (bien
que la fraude scientifique y existe).
Les codes d’éthique de la recherche sont nombreux, et ont
été développés par des Institutions de recherche. Spécifiquement les rédacteurs
de revue ont créé un organisme à but non lucratif, sans pouvoir de décision,
pour discuter des fraudes et diffuser des codes d’éthique. Il s’agit du Committee OnPublication Ethics (COPE),
un réseau de plus de 7000 rédacteurs de revues. Le 3ème congrès mondialde
l’intégrité scientifique a été organisé à Montréal, Canada, du 5 au 8 mai
2013, et révisé une déclaration en 20 points qui n’a pas encore de traduction
française : « Montreal Statement on Research Integrity in
Cross-Boundary Research Collaborations ».
Les pratiques liées aux revues électroniques, voire aux
sites internet mettant en ligne des contenus éditoriaux d’accès gratuits ont
été peu étudiées. Il existe tout le spectre de la qualité : du meilleur au
plus mauvais. Pour les revues biomédicales à comité de lecture, les enjeux sont
les mêmes que le support soit imprimé ou mis en ligne, et détecter les fraudes
n’est pas spécifique à l’électronique. Pour tous les blogs, et sites dans lesquels
des contenus sont diffusés, il existe une variabilité en ce qui concerne la
qualité du contenu. Tout ceci est lié à la crédibilité des équipes qui
produisent ces informations. Cette évaluation est difficile pour le lecteur,
d’autant plus que des labels comme le ‘HON code’ sont trompeurs car ils
n’évaluent pas la qualité. Ces labels examinent des processus de production, et
n’évaluent pas les contenus.
HM.
Bibliographie:
[1] A consensus statement on research misconduct in the
UK. BMJ 2012;344:e1111 -accès
restreint-
[2] What is the purpose of medical research ? The
Lancet 2013 ;381 :3
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